Mots et couleurs

textes auto-biographiques anciens et actuels, poésie, chansons, contes et nouvelles

29 avril 2006

TOUT AVRIL

- Pâques étant au balcon cette année on peut désormais voir ici les oeufs s'afficher.
- Autre retour en arrière daté du 4 Avril, histoire de se rappeler qu'Avril est le roi des funambules.

Toute la journée sur le balcon
le bal à Jo des sensations
Des couleurs des quatre temps
la balalaïka étrange
les flons-flons
Temps de neige, de fleurs, d'aval-anges
Reprise du merle noir sur le blanc des alpages
Vols planés et atterrissages ...

On n'en peut plus, on est repu
Arrêtez les espoirs, les ciels bleus
les vacances !
Ne pleurez pas la reine !
Le page gris s'en va
Dès qu'à votre sourire
il reprendra courage
en rose et mauve reviendra ...

C'est ainsi : la folie
la douce et sainte fièvre
c'est encore l'hiver
c'est déjà le printemps
et le livre entr'ouvert
perplexe
pince ses lèvres
Serait-ce que là-bas
avec des mirlitons
le seigneur tout-puissant
écrit son testament ?

Un bal à Jo des sensations
Couleurs des quatre temps
Fête à tous les étages
Bénie sois-tu la page !

Publier le message.

28 avril 2006

90 ET PLUS


Il faut croire que je commence à préparer ma succession puisque j’ai osé attaquer un carton de vieux MONDE littéraires pour allumer mon feu d’herbes sèches.
Non sans retenir d’un feuillet à l’autre, un nom, un titre que je ne pouvais décidemment pas encore brûler.
Ainsi « YVES GIBEAU , cet anarchiste qui déteste le désordre » (Pierre Lepape)
L’auteur de MOURIR IDIOT y est en photo (2 septembre 1988) visage figé comme une statue de sel. Les yeux en blanc et noir brillent cependant d'un sacré éclat !
« Dans cet incessant roulis de la vie et de la mort, du sentiment et de l’esprit, l’écriture assure tout à la fois la tenue et la direction de l’esquif. Elle apprivoise les contradictions, elle négocie les embardées. Elle donne au récit ce minimum d’ordre qui lui permet de dire la vie sans la tuer /…/
Chez Gibeau, l’anarchie n’est pas seulement une conviction politique ou une vision généreuse du monde, c’est un style : la liberté de l’écriture ne se gagne que dans l’usage et le respect amoureux des mots »
Je vais essayer de me procurer le bouquin.
Dans le bulletin de la MGEN je trouve des informations sur les sites de nonagénaires. Je n’y suis pas encore allé voir. Mais
www.membres.lycos.fr/nonagenaire
devrait me rassasier.

Il y a de la vie après 90 ans. J’en suis convaincue. Et, en cas de doute, il me suffit de regarder une dame alerte revenir du marché avec ce qu’elle appelle sa « mercédès ».

REVE EN COULEURS


Couleurs en rêve
Dès le premier œil ouvert j’y vais vite pour en ressaisir les flacons avant qu’ils disparaissent de ma mémoire. Rêve on ne peut plus net en formes et couleurs. Même les mots sont inscrits à l’encre indélébile.
C’est un lot de flacons d’encres dénichés dans un magasin (?) ; je vais négocier l’achat à prix réduit de la boîte entière. Je ne vois pas très bien la hauteur du produit restant dans chaque flacon car ils sont entamés ni même la couleur car les étiquettes sont salies MAIS, sans aucun doute, c’est une affaire si on veut bien me les céder. Il y en a une vingtaine au moins ce qui avec les mélanges va donner un sacré festival. « On » n’a pas l’air intraitable, semble très perplexe. Je lui explique pour l’attendrir que ce sera « pour ma classe » ce qui dans les tréfonds est certainement un gros mensonge. Enfin la boîte de couleurs est à moi, dans mes bras, et là je me retrouve au milieu d’une troupe joyeuse, certains habillés tout en blanc, d’autres en noir. Et j’ai un éblouissement, une idée formidable que je leur communique : Les flacons ! Les jeter sur ce fond banal pour le faire chanter ! Je n’entends pas leur réponse mais j’en ai tellement envie ! Eclabousser la vie de couleurs !
Dans le bazar des mots échangés il y en a un JEU de MOTS qui me ravit aussi : il est question de Pétain et je souligne la première syllabe.
Ne fallait-il pas vous barbouiller de ces couleurs du rêve pour le transposer, je me demande bien comment, dans la réalité ? Je suppose que c’est le fait d’avoir jouer à l’aquarelle dans mon cahier en imitation d’une tapisserie beauvaisienne qui me l’a inspiré. Je caresse l’idée d’une réalisation en grand sur toile un beau jour d’été à La Loue.

Affaire à suivre à moins que vous me proposiez une tout autre interprétation et que je doive flanquer à la poubelle la boîte aux flacons malodorants.

27 avril 2006

SETE A BEAUVAIS



Lettre de Sète à Beauvais

Mon cher Beauvais
Je craignais d’être passé un peu vite près de toi. Je n’étais pas très en forme, toi tu avais noyé les tiennes dans la pluie. Heureusement il y eut les musées et la cathédrale, un beau spectacle de chansons … J’avais laissé les photos chez l’ami Mac, les pages blanches récapitulatives dans l’album de dessin. Et il a suffi que j’arrive à Sète, dans son soleil et son éclat de printemps pour avoir envie de te retrouver.
( les fenêtres sont ouvertes sur le tintamarre de la rue, il pleut à Mèze, il pleut à Balaruc et ici, non !)
Tu vois comme je suis ! Loin des yeux, près du cœur !
Eh bien je me régale à te retrouver en différé. Surtout pour les visages de bois enlevés aux façades moyen-âgeuses, et pour les tapisseries modernes du musée de la Tapisserie.
Tu as beau porter un nom d’opérette je ne t’avais entendu que dans un chant patriotique pompier … Maintenant nous avons loisir de ré-accorder nos violons et d’affiner notre rencontre.
Je m’étonne toujours de pouvoir passer si facilement par le biais d’un billet de train du Nord au Sud. Je pense à mes parents qui n’ont jamais quitté leur terre d’origine. Le maximum du déplacement devant être Lyon. J’ai eu la chance de regarder la terre d’avion, les humains de plus près par le petit bout de leur lorgnette. C’est une chance de retraitée, de petite intello. C’est une chance de partager cette chance avec un compagnon branché souvent sur les mêmes longueurs d’onde.
Je suis partie cette fois-ci, non avec Gaspard des Montagnes de mon cher Henri Pourrat mais avec Plume d’Ange de Martin Winckler. Le livre fait un retour-aller puisque je l’avais acquis à Sète lors de mon dernier passage en février.
Dès la préface le livre annonce la couleur, franchement autobiographique, décline ses noms et propriétés : Martin Winckler de son vrai nom Marc Zaffran. J’avais entendu son auteur le présenter avant sa parution à L’Apa et nous entretenir de son site qui tissait entre lui et le lecteur plus d’une connivence, véritable tapisserie comme celles de Beauvais, de fil à fil, d’histoire à histoire et, le hasard aidant, de personnes à personnes s’étant frôlées dans le passé
Quand j’ai attaqué la présentation écrite dans le train je me suis sentie à nouveau projetée dans cette incessante réflexion sur l’écriture qui nous anime, nous les écrivains-écrivassiers. Je venais de lire avant de partir le blog de Julie. J’ai reconnu comme à chacun de mes cahiers ce besoin de faire le point avant le parcours, ce rassemblement de forces et de bonnes dispositions pour se dire qu’on ira jusqu’au bout, quelle que soit la difficulté. Ainsi avais-je commencé ce « Livre de ma mère » qui me tint plus d’une année et que je n’ai pas retouché depuis …
Ne t’inquiète pas mon cher Beauvais ! Tu n’es pas qu’un prétexte de démarrage. Mais tu sais bien que chaque voyage me ramène toujours à la ville principale à explorer : Moi !
Et cependant « J’ai fini par comprendre que jamais dans ce que j’écrivais il n’avait été seulement question de moi. /…/
Aujourd’hui, je sais que si j’écris, ce n’est pas que j’en ai le goût, le vice ou le don, mais parce que comme beaucoup de mes semblables, j’ai une malle à traîner. Ecrire m’a aidé à ne pas m’écrouler sous le poids. »(p 22)
Si bien que, les années s’accumulant, je sens la malle de plus en plus légère et que, là où elle pèse encore, je ne songe qu’à déballer ses objets du passé pour les inventorier, les repeindre, les réparer même si je l’ai déjà fait à plusieurs reprises.
Bonne journée mon cher Beauvais ! La mienne devrait être excellente. Notre nonagénaire sétoise est en train de fariner les rougets pour les frire. Je passe en cuisine pour savourer le Sud par les yeux avant de le faire par les papilles.( et confirmer de ces différents points de vue olfactifs, gustatifs, visuels ma préférence sur le nord !)

EL BIBILICO


El bibilico
Hier au soir, ou cette nuit peut-être pendant la pause de sommeil, le bibilico est revenu chanter en moi. C’est le nom espagnol du rossignol ; c’est le sujet du troisième couplet de la chanson catalane que j’ai chantée avec le groupe d’improvisation la semaine dernière. Etre accompagnée par des musiciens c’est super ! Claire à la dabouka, Marie à la flûte, Béatrice et Brigitte aux pianos. C’est super supérieur dans les improvisations. Je ne sais ce qui se passe de magique entre la voix et les instruments, allant chercher chacun la preuve de leur liberté, de leur total droit de s’élancer les uns vers les autres sans préméditation et sans barrières. Je sais, par quelques réflexions après coup, que notre bonheur est ressenti par les auditeurs. Le lendemain, il m’habite encore et me donne une force et une souplesse inattendues au jardin, dans les iris par exemple …
Quand nous sommes rentrés à La Loue un peu après minuit, deux oiseaux chantaient. Etonnante impro dans le silence des étoiles. Réponse de l’un à l’autre sur la même gamme d’harmonie. La nuit suivante je les ai encore entendus cette fois-ci vers quatre heures. A croire que, sans interruption, la nuit sert de scène de répétition. Je ne sais identifier les chanteurs. En toute logique ce devait être des bibilicos.
Revu hier au soir le film « les choristes ». La première version se nommait « La cage aux rossignols ». A Marcelle qui doute de la véracité de l’histoire je rappelle les réussites de notre enseignement qui parfois, comme le rossignol, a réussi à faire chanter la nuit. J’essaie de lui décrire ce sentiment de communion, d’amour au-delà de l’ego, qui s’empare de nous quand nous laissons le chant intérieur rejoindre nos frondaisons et, pour conclure, je lui chante la chanson :
El bibilico canta
y sufre del amor
Y la passion lo mata
No escucha mi dolor
J’ai pourtant l’impression qu’à force de s’enivrer de son chant le rossignol oublie tout de cette fameuse douleur d’amour inguérissable, régénère l’eau du puits et boit la lune jusqu’à plus soif. Croit en Dieu comme à l’absolu du plain chant.

24 avril 2006

IRIS


L'atelier d'écriture au jardin

l'iris ou plutôt les iris qui s'imposent immédiatement à moi c'est ceux que j'ai desherbés il y a peu. Ils sont plantés à ras du mur de façade de la maison qui s'ouvre sur la cour herbeuse. Ce sont les premiers que j'ai implantés. Ils viennent du sud, quelque part en garrigue quand nous caracolions avec "le parrain" à chercher des asperges sauvages. J'avais du mal à le suivre, je m'amusais de voir l'excitation de cet homme déjà agé si empressé à me faire connaitre son pays et ses ressources ! Et puis les iris se sont offerts dans une ruine. Nous avons trouvé un vieux seau de plastique pour les loger et je les ai ramenés en Bas-Dauphiné où ils ont doublé de taille en gardant l'intensité du violet. Je les ai donc nettoyés jeudi des orties et des ronces comme chaque année. La plaque s'est élargie. A l'abri du mur ils avaient déjà formé la fleur. D'autres iris sont au jardin, encore de récupération cette fois dans un champ d'horticulteur abandonnant sa production, où m'avait entrainée ma voisine. Nous allions à l'aveuglette car les rhizomes n'identifiaient pas les couleurs. Quelle émotion quand elles ont éclaté dans nos parterres. Des splendeurs ! je visite le jardin de ma voisine comme une exposition. Elle soigne beaucoup mieux que moi ses iris. J'en ai un dossier photographique dans l'ordinateur et ça et là je les accompagne de quelques mots. Devant leur variété, leur force, l'écriture est assez impuissante. L'iris de mes yeux se trouve muet devant eux ! Un comble !

23 avril 2006

LO GABIAN E L'IRONDELA



Après le spectacle les passionnés d'orgue

Le gabian et l’hirondelle ont commencé leur tour de France et de Navarre ce samedi. C’est toujours tellement plus agréable de voler « pour de vrai » que de répéter en chambre ! Ce matin du dimanche pendant que nous marchons dans les bois conduits par notre hôte, de nouvelles idées arrivent : arrangement de mots, jeux de scène, que je communique à Pierre aussitôt …
Et surtout l’idée suivante que je vais essayer de détailler.

AMOURS, TOURISME ET ORGUE …
Dans un rayon, disons de 6O km autour de notre camp de base en Vercors, trouver le gîte, le couvert, la soupe et la chopine pour une soirée en compagnie de nos histoires et chansons.
Qu’en dites-vous ? Marché honnête ?
Je ne suis jamais passée par la Lorraine, Bruno, mais pourquoi pas dans un avenir à prévoir ! Henri Pourrat nous a fourni la matière de deux histoires « la pipe » et « Cric-crac » tome 7 du Trésor des contes

22 avril 2006

OEUFS DE PAQUES


Pâques se fête cette année chez Michaela dont vous vous souvenez peut-être des perce-neige de la tradition bulgare.
Ce jour-là ce sont les œufs qui sont à l’honneur. Les oeufs de Pâques symbolisent pour les chrétiens et non-chrétiens le renouveau, la nouvelle naissance.
Corbeille pleine d’œufs sur la table de fête et variété des décorations aux pigments naturels achetés chez l’épicier arménien.

Avant l’apéritif l’hôtesse dessine sur chacun de ses petits-enfants et sur nous-mêmes, autres grands-parents et parents, le signe de la croix avec un oeuf rouge de la couleur du sang du Christ
« vofimetona otchai i sïn i svetago doura amine » ( au nom du père et du fils et du saint esprit amen)

Puis nous passons à table. On choque les œufs l’un sur l’autre. Celui qui est cassé est perdant. La tournée se termine par la victoire de Nico dont c’est l’anniversaire. Ça tombe bien !
Kristos voskréssé ( Christ est ressuscité)
Voïstina voskréssé ( En vérité il est ressuscité)

Nous emmènerons chacun un œuf que nous pourrons envelopper de papier d’aluminium et conserver jusqu’à Pâques prochain. Si un an se passe sans qu’il moisisse l’année suivante aura bonne santé.

Michaela évoque avec émotion la pratique familiale et raconte que même pendant les pires années du communisme les œufs, les bougies, les voeux s’échangeaient sur la place où les étudiants se retrouvaient.

J’ai demandé à Michaela de me convier à la préparation des œufs l’an prochain. Ils sont beaux, on dirait qu’ils sont en verre ou en céramique une fois peints. Ils peuvent aussi se manger : pas mal au foie, pas en chocolat : des oeufs de poule comme on en fait tant !

21 avril 2006

AU SOLEIL


Repas au soleil dans la cour de La Loue -la-bienheureuse. Cui-cui, tulipes, magnolia et Etcetera ...
Madame tend la joue au soleil. Monsieur dessert la table.
- Et si c'était ça le bonheur ? dit la dame.
Monsieur tend ses lèvres en guise de réponse.
Madame :(les yeux dans les yeux) "tu sens pas le fromage ?" (madame n"aime pas le fromage)
Monsieur " Et si c'était ça le bonheur "

19 avril 2006

BAUDELAIRE



Ah Baudelaire ! les fleurs du mal non ? Qu'est-ce que j'ai fait des fleurs du mal ? Oubliées, balayées, bousillées Je me fous du passé ... Garnier je crois. C'est J mon futur époux qui me l'avait confiée, c'était une édition jaune, le jaune du mal et de la trahison ? Fatiguées, souvent cueillies, parfois fanées ; la couverture du bouquet se débinait. Le soufre du mal, la sexualité, la révolte, les amours interdites, ce que l'on ne comprend pas et qu'on brûle d'approcher. On, Moi, Moi toute petite, rien qu'une petite paysanne, et un grand poète, même Claudel, pilier d'église, y croit à Baudelaire, à Rimbaud peut-être davantage. Correspondances "Les parfums, les couleurs et les sons se répondent". C'est donc vrai ce que je ressens ? L'illimité de mes perceptions troublantes sont donc dans l'air du temps ? Leur mélange incertain va trouver dans les mots la clarté. Cet albatros qui ressemble à Baudelaire dois-je l'envier d'être cloué sur le pont par les hommes d'équipage ? Hein ? Ne devrais-je pas rester bien sagement dans le pré avec mes vaches et la comtesse de Ségur ? C'est pas le tout de se vouloir poète, encore faut-il rentrer à l'Ecole Normale et pour ce, commenter Baudelaire, habiter sous ses vastes portiques, le réciter à tâtons dans le noir. Pleurer d'une douceur qui vous submerge, mon enfant, ma soeur, abriter dans ce cercueil quelque part le fragile et merveilleux souffle de vie, le mystère de ma présence au monde, l'égarement de la mort qui me tourne autour, ma foi …

(Baudelaire était la proposition d'écriture à l'atelier)

GROSSE COLERE


LA COLERE

Chaque fois que mon foie, mes intestins, ma rate et sans doute ma vésicule ont de véhémentes protestations contre mon style de vie ( pas le style littéraire, de celui-ci ils ne font cas puisque ils se taisent même quand ils sont en dérangement et que je nous installe devant le clavier) chaque fois donc, … et cette nuit est la plus récente …
Je m’interroge sur ce que j’ai mangé, ce que j’ai bu, ce que j’ai fait juste avant la crise etc … pour conclure généralement « Ben j’sais pas ! » J’comprends pas ! ça allait pourtant si bien ! »
Hier au soir j’ai dansé avec une énergie superbe dans notre groupe superbe de danseurs du lundi. A la fin vers 11H30 j’ai mangé de la tarte, j’ai bu un peu de jus de fruit … Bon ! je n’aurais peut-être pas dû … Ou alors le gâteau au chocolat de Pâques ?
La lecture du débat sur la colère dans le blog de Mariel m’invite à un autre inventaire.
Dans l’après-midi je risque quelques rangements sur la véranda où je dérange habituellement tout mon barda de peinture, encres, papier, cartons à dessin … Catastrophe ! L’arrosage des plantes juste avant de partir en week-end pascal a provoqué une remontée dévastatrice de flotte dans les cartons, surtout dans ceux où je garde mes « effervesc’encres ». C’est des trucs géniaux des jours de pleine forme où je jette sur de grandes feuilles des graphismes et une phrase, un mot en calligraphie. Depuis plusieurs années je les stocke en pensant vaguement leur faire prendre l’air un jour, quelque part, en exposition. Rien de bien sérieux du moins je le croyais. Mais à constater les dégâts je suis prise de rage folle ! Je jette les brassées par terre en dessoudant les pages collées, sur le lit, sur toutes les surfaces disponibles. J’éclate en imprécations, grandit la catastrophe au rang mondial, interplanétaire, incrimine le responsable de l’arrosage etc… je me fais mon ciné, tout en essayant d’agir. Il fait beau dehors je continue de dépecer les bêtes au soleil en les calant sous des morceaux de bois à proximité … peu à peu dirige ma colère contre moi, qui ne suis pas allée au bout des précautions à prendre, des arrosages à déclencher, du temps à gérer et des choses matérielles à maintenir, des responsabilités à reconnaître … La même gamine qui tapait le poing sur la table en représailles auprès de sa mère et proclamait « J’ai bien mangé aujourd’hui, je mangerai rien demain » se sent aussi hurlante qu’aux origines. Me l’a-t-on répété assez la petite phrase idiote en s’en moquant ! Me l’a-t-on assez répété « Je suis la fille à mon père ». Je suis la fille de la colère. Bien que, du côté maternel, c’était pas mal non plus !
L’incongruité de la vieille dame qui renoue avec la gosse éruptive ne m’échappe pas longtemps. Je flanque sous ma langue une bonne rasade de « rescue », situation de crise, et commence à minimiser, à imaginer comme ce pourrait être amusant et nouveau des collages d’encres récupérées sur les morceaux récupérables, les adaptations des formules … mots et couleurs à remodeler, mélanger, redécouvrir … (il faut bien avouer qu’elles dormaient en ce moment les effervesc’encres et qu’elles viennent de trouver le moyen de se rappeler à moi !)
Et puis je vais faire un tour, la crise est finie, n’a pas atteint les sommets qu’elle était susceptible d’atteindre. Je propose même à l’arroseur incompétent la promenade salvatrice en ma compagnie.

Le résultat sur l’organisme a attendu la nuit pour s’exprimer : CQFD. La colère s’évacue par la tuyauterie des déroutes.

NB Depuis que j’ai lu le bouquin sur la syncope je ne suis plus tombée en syncope. (Presque mais pas tout à fait.)
La lecture de « psychologie de la colère » aurait-elle aussi des vertus curatives ?
J’ai l’impression que ce simple écho sur la vieille dame colérique, coléreuse et colérifique suffira peut-être. Avec la diète à maintenir bien entendu ! Merci Mariel !

LES VIEUX LES ENFANTS


Les vieux les enfants
C’est une chanson de Michèle Bernard que je suis allée chercher dans le CD à la lecture de vos blogs
Celui de Julie qui parle d’une pièce de théâtre où les vieux sont malmenés
Celui d’Aben qui raconte le passage de ses petits enfants à la maison et sur les ordinateurs

Le vieux les enfants
Leur manque des dents
Pour croquer dans les pommes
Et avoir l’air sérieux
Les enfants les vieux

Bribes de conversation avec mon petit-fils (17 ans) sur le « droit » à la mort quand on est vieux (il place la barre vers 80 ans) Je lui ai seulement dit que son point de vue ne pouvait être que circonstancié par son âge et que moi, d’où j’étais, je comprenais « l’acharnement thérapeutique » et le besoin de s’accrocher
( … à un rayon de soleil, à un bisou, à un petit gâteau …)
Sur le chemin j’ai rencontré Tamara qui rentrait de l’école ( elle est en sixième) et Sylvie ( elle a dépassé 90), toutes deux contentes de se faire la bise. Mon appareil était en poche.

Je vais l’apprendre cette chanson et apprendre à l’accompagner au piano. Je vais peut-être même m’y mettre tout de suite (Tant qu’on peut, pas donc !)

Les vieux les enfants
S’en vont en chantant
Leur ancienne comptine
Où l’eau éteint le feu
Les enfants les vieux

18 avril 2006

LA CLEF


(Le mot de l'atelier d'écriture)

La clé de l'armoire est cachée. L'armoire est à secrets. J'ai trouvé la clé et l'ai fait tourner. Les pauvres secrets !

Mes rêves affolés ! Où donc est la clé ? Comment vais-je entrer ?

Ce printemps qui éclate de partout. Les portes s'ouvrent au soleil. Je ne remâche plus le passé. Dire que je n'ai plus peur est un peu péremptoire … mais j'ai laissé la clé au bord de ma mémoire.

La clé de St George : Quand je l'aurai assez portée je la laisserai tomber au pied d'un poirier.

Qui a volé la clé des champs ? La chèvre beige ou le loup blanc ?

Autant de clés à nos trousseaux que de fenêtres à nos barreaux. Dans de beaux draps sommes lotis.

La clé du bonheur. Peut-être à trouver tout-à-l'heure.

L'heur du thé. La clé glissée dans la serrure, la gorgée chaude dans le gosier.

« oh dites-moi, dites-moi
Pourquoi ? Pourquoi ?
Le temps perdu revient déjà ... »

le mot clé, le mot croisé et le mot débridé.

Sous clé, les pauvres secrets se sont en allés. A travers prés.

17 avril 2006

LA LOUE EN AVRIL


LA LOUE EN AVRIL
Vidéo envoyée par gelzy

chez moi, chez nous : à la Loue, l'irruption du printemps

Tant de chansons et de printemps
dont j’ai vraiment à rendre compte
que je ne sais pas trop comment
m’y prendre …

Sur les talus, près les fossés
les renoncules, les girerdes*
Chez ma voisine d’à côté
des jacinthes plus que doublées,
Des primevères …

Des boutons d’or nous disions
en nous collant sous le menton
les petites corolles jaunes
« Aimes-tu le beurre mon ami ? »
la peau blanche répondait oui
et nous nous embrasions aussi …

Même le pain du boulanger
a envie encore de jouer
à la levure et aux lunettes
c’est bête …

Le magnolia est supérieur
comme les qualités de cœur
de Pauline qui me l’offrit
ici-même …

Supposons que le jardinier
à force de boire ait tremblé
sous l’objectif
A moins qu’à trop le regarder
faucher, râteler, écouter
le magnolia se soit trompé
de tifs …
Lui ait flanqué une perruque
éclaboussée d’un voile blanc
pour qu’il tire à hue et à dia
sur l’herbe verte du printemps …

Bref ! Je ne veux trop insister
mais la saison nous a troublé
la tête …

J’ai même entendu le coucou
Coucou hibou caillou genou
La vie est chouette
A la Loue
Et découvrons-en tous les fils
en Avril !

N.B Girerdes, clochettes : spécialités de La Loue, espèces protégées

12 avril 2006

CHANSONS à la FRAMBOISE




Un rouge s’est fixé dans ses yeux de framboise
Pas un rouge ! Un rose comme sur une fleur
Le sourire s’est mué en papillon d’étoile
Elle offre son reflet dans le verre du bonheur
Dans le verre du bonheur elle boit, elle participe
Elle donne à la chanson ses oreilles et son cœur
Elle a soif, elle a faim : par goût et par principe
Elle prend tout : les couplets, les refrains,
Le solo et le choeur.

( elle était, trois soirées de suite, à nous écouter chanter, passionnément attentive et encourageante.)

11 avril 2006

CROCUS A LA NEIGE


La neige a croqué les crocus
enfin sortis du long hiver
Ils pavoisaient, ils étaient fiers
de quitter le marché aux puces
pour s’installer dans la lumière.
Pourtant c’est Avril, Nom d’un chien !
Elle pourrait se faire plus discrète
Mais elle a, tout bien réfléchi,
envie de s’offrir à Julie
qui aime tant ses petits riens
pourvu qu’ils brillent comme des paillettes.



Elle croit qu’elle va ainsi la faire
Revenir parmi nos paquerettes !

10 avril 2006

EN SOMME

En somme
S'y prendre à deux fois pour aborder la nuit
n'est pas plus difficile
qu'accoucher la montagne avec une souris

En somme
Regarder
par le trou de serrure
la nuit sous l'abat-jour
est aussi palpitant que guetter l'impossible par un judas-écran

En somme
accepter que dormir soit du temps à revendre
Attendre l'occasion pour faire monter les prix
devrait être une chance plutôt qu'une insomnie

09 avril 2006

CHANTER


CHANTEZ !
Vidéo envoyée par gelzy


Chanter, avoir peur, avoir mal mais chanter
jusqu'à sa dernière heure chanter ...

Un patchwork de chanteurs pour illustrer les paroles que fredonne à mon micro Pierre D. Chef de choeur et chanteur lui-même.

mes couleurs de printemps


Pour un dimanche c'est un dimanche encore gris. La montagne n'a pas vraiment appris à débourrer ses couleurs vives comme dans le blog d'Aben.
Mon forsytia enchifronné. Mon nez bouché. Aucune odeur de ce printemps qui lui parvienne. J'ai bien logé dans un beau vase trois branches du dit forsytia. Elles font mine d'être flattées mais pour l'extase il faut attendre encore un peu.
Oui mais j''y songe ! J'ai moi aussi du printemps bleu qui rutile dans le paysage tout gris. Près de la ferme, avant hier, en traversant le bois miteux.
Voici Aben !
Histoire de ne pas me faire doubler par une technique plus musclée, mieux planifiée que mes abeilles.

07 avril 2006

SEIZE EN TOUT


Il y a des coïncidences qui me ravissent. Je ne crois pas que j’y étais aussi sensible avant.
( - Avant ?
- Avant que j’ai l’attention et le temps de faire coïncider …)
-
Voici l’histoire aux seize tiroirs.

Pour la lecture de la semaine j’ai choisi « PRENDRE UN ENFANT » de Yves Duteil illustré par Yves Beaujard. Collection Histoires et Chansons chez Nathan. L’histoire est un peu longue. Tiendront-ils le coup jusqu’au bout ?
Dès l’instant où nous sortons de leur école pour rejoindre la bibliothèque mes mains sont sollicitées par quatre paires exigeantes. Je m’en sors en les nouant les unes aux autres. L’histoire pourrait déjà porter comme autre titre « Prendre une grand-mère par la main » Encore que pour eux il semble ne pas y avoir d’échelle d’âge entre nous. Je suis Gisèle tout court et je bois du petit lait dès qu’ils m’interpellent dans la cour ou arrêtent l’histoire en plein courant pour me raconter une des leurs qui leur passe par la tête.
L’histoire, pour Margaux, ce jour-là, est celle des perles qu’on lui a données pendant la pause de midi. Des belles perles roses, mauves, violines, vert acide … Elle les a mises dans son bonnet qu’elle serre d’une poignée farouche pour qu’elles ne s’échappent pas et surtout pour qu’on ne les lui prenne pas. Sur le chemin elle m’en parle ; arrivée à la bibliothèque elle consent à me les montrer et même à les montrer à ses camarades, les ré-enfouit dans son bonnet …
L’histoire du livre fait se rencontrer un guitariste et une petite Clémence. Le guitariste a trouvé une mélodie mais cherche vainement des paroles. La petite fille n’a pas de papa et sa main vide cherche désespérément une autre main en parallèle à celle de sa maman. Clémence rejoue avec ses pâtés de sable les histoires d’enfants malheureux que sa mère lui raconte chaque soir. De vrais malheurs : malheurs de la faim, de la guerre, de la misère sous toutes ses formes et dans tous les pays du monde, de la Colombie au Vietnam, des Philippines en Ethiopie … Après plusieurs jours d’observation et d’écoute des histoires que raconte Clémence à ses pâtés de sable, pour le guitariste « les mots s’écoulent comme une sève, … pour dire que le bonheur existe, et offrir une parcelle lumineuse sur un écrin de musique » Il ne me suffit plus que de chanter la chanson tandis que, sur ma gauche, je sens un mathématicien préoccupé par le nombre des pâtés de sable et une princesse obnubilée par ses perles. A la fin de la chanson j’ouvre les deux cages
- 11 ! annonce Xavier !
- 13 ! rectifie Jordan
Par souci d’exactitude nous comptons les pâtés de sable et arrivons à 16.
Margaux qui n’en peut plus d’attendre son tour a les perles en transe. Et si nous les comptions elles aussi ?
Pas d’erreur ! elles sont passées une à une de la gauche à la droite et il y en a … 16 !
Tout se précipite : l’heure de rejoindre la classe ! les 16 perles dans leur bonnet, les 16 pâtés de sable dans le livre refermé, les 12 enfants de l’histoire plus les 4 présents, ce qui fait encore 16 … le titre de l’histoire à écrire que je jette sur mon bloc-notes sous leur dictée « Les 16 perles de toutes les couleurs et les 16 châteaux de sable d’une couleur »
Au retour il n’y a plus que Louise à mes côtés, les trois autres sont déjà dans le couloir. « J’ai une idée ! dit Louise
- Oui ?
- Ça serait à la campagne. Le magicien il a des diamants de toutes les couleurs et il les donne et ça fait un papa et une maman pour tous les enfants …
Les perles sont devenues diamants, les pâtés châteaux, et la chanson de l’histoire lue, histoire à écrire et chanter. Ma voix elle-même, embroussaillée par la grippe a pu, le soir, s’élancer sur la colline aux oiseaux …

Cette histoire serait-elle un remake de celle de la multiplication des pains ?

06 avril 2006

QUITTER GASPARD


D’un dimanche à l’autre et du Beauvaisis au Dauphiné je ne l’ai pas quitté d’une semelle. J’avais retrouvé l’avidité de lecture de mes jeunes années quand je galopais d’un bout à l’autre des gros livres avec jubilation. J’ai parcouru ainsi, bride abattue, les verstes, les lieues, les kilomètres des romanciers russes, américains, et Zola et même Anatole France et Giraudoux, Proust bien sûr, etc … Je n’ai alors ni mal à la tête ni mal aux yeux. Il faut que j’aille. Sans moi les personnages vont mourir, la flamme du style va s’éteindre. Ils vivent de cette vie intense qui me soulève.
Et donc Dimanche au soir, il a bien fallu arrêter le galop. Me reposer. Dormir. J’ai cru qu’Anne-Marie était morte et j’ai laissé Gaspard face aux étoiles, hébété. Je m’étais trompée. Je viens de relire ce que mes yeux et mon esprit fatigués avaient mal lu.
« Et voici Pauline au haut des trois marches, encore en larmes, qui sourit. » : Anne-Marie est sauvée par le remède. Ouf ! Ces deux-là Gaspard, Anne-Marie, qui s’aimèrent tant, pourront encore s’aimer. Le diable n’aura pas cette fois-ci le dernier mot.
Merci Henri Pourrat et son messager Bruno Le Lorrain. Quand les personnages d’une histoire viennent se couler dans nos veines c’est qu’ils nous ressemblent, ressemblent à nos pères, mères, frères et sœurs. Leur époque est la nôtre. Leur pays traduit dans les mots de leur langue est notre pays d’espérance. Il vit. Il vivra. Il ne peut pas mourir.



« Va, maintenant, va vers eux, vieille histoire,
Descends des plombs et des soixante puys,
De ces pays d’air bleu, de pierre noire,
Pays du peuple aux os durs, nos pays !
Va vers ceux-là que l’Auvergne accompagne,
Si loin soient-ils, vole-leur au-devant !
Vieille musique aussi loin que le vent,
Vole vers ceux qui sont de la montagne. »

Et pour que nous quittions Gaspard sur de belles images, voici celles que ma promenade tantôt m’a données. Montagne et enfants de la montagne compris.

05 avril 2006

LA MEDITERRANEE


Henri Pourrat (Conte du Chèvreton)
« J’ai le cœur si joyeux
qu’il ne pourrait en être mieux »
****
Je me suis fait la Méditerranée
Dans ma baignoire aux merveilles
Et j’ai senti remonter les années
A plat ventre sur le soleil

Sol Sol Soleil, Soleil de ma saison
Tu viens encore réchauffer les brandons
Foutre le feu à la vieille carcasse
Tu viens encore me guetter dans la glace

Regarde bien ! Mes sourcils sont serrés
Mes paupières planent sur le bleu adoré
Mon nez refait hume les éprouvettes
De cent et un parfums dedans ma tête

Dedans ma tête j’ai quinze ans aujourd’hui
J’aime Momo peut-être il m’aime aussi
A mon brevet quand il va réussir
Peut-être que je saurai le retenir

J’aime Momo Certes j’aime aussi
Le chocolat, les bonbons à l’anis
Même la trigo avec ses cosinus
Même mon nez et malgré mes sinus

Dans ma baignoire Ce matin au réveil
Je me suis fait révision des merveilles
Merveille ! j’ai tout trouvé encore intact
Mes espérances mes cliques et mes claques

Je me suis fait la Méditerranée
Petites brasses et immenses foulées
J’ai embrassé le matin jouvenceau
Ma plume chante et chante mon pipeau !

04 avril 2006

GASPARD DANS LA RUE


Les mains sur la guitare font beau jeu des arpèges
Elles savent accompagner nos espoirs de chansons

« Je suis du camp des prolétaires » proclamait une de mes chansons légèrement post-soixante huitarde. Pour compenser la déception du 1969 politique, j’avais trouvé deux solutions ou plutôt deux solutions étaient venues à moi spontanément : les chansons et un enfant. Autour de 2000 une femme, Monique Broc, eut la bonne idée de proposer à la fin des journées de L’APPA « Que reste-t-il de nos souvenirs de 68 ? » Je répondis à la demande par quelques pages de mon premier carnet autobiographique d’alors puis participais à l’échange épistolaire dru, dense, qui s’installa pendant deux années entre une quinzaine de « filles de Mai ». Le cahier qui en fut tiré s’appela « 68 dans la mémoire des femmes » puis, repris en livre par un éditeur bordelais, « Les filles de Mai ». Titre provocateur sur belle couverture rouge à slogans. Ma chanson qui porte ce titre et le donna au livre y est en bonne place. Ai-je jamais rêvé d’une pareille audience quand je me la chantais ? Non ! Bien sûr ! mais je ne m’étonne plus maintenant de ces retours du passé qui projettent dans le présent leur cadeau. Comme les amours enfantines ! Ils badigeonnent le cœur en outremer.
Samedi Claude vient pour notre ultime répétition avant les trois soirées chantantes autour de son anniversaire « 25 ANS DE CHANSONS » à La Guinguette. Nous avons mis à deux voix nos chansons en particulier ma « fille de Mai » et sa « Rose » J’espère que le voyage en train éloignera définitivement les microbes du Beauvaisis de ma gorge ( « C’est un microbe ! » m’a dit la femme de ménage de l’hôtel : la preuve son mari, « qui pourtant est fort », y a succombé !)
J’aimerais tant donner à cette fille de mai vieillissante qui s’appuie sur la guitare de Claude l’ardeur et la foi de la fille de mai jouvencelle qui, en balayant ses escaliers ou en préparant le biberon, entonnait, les larmes aux yeux :
« Quelle était belle la fille de Mai
Quand elle riait de toutes ses dents
Quelle était belle la fille de Mai
Quand nous la suivîmes en chantant »
J’exige (s’il vous plaît) un e-mail pour me dire que vous avez commandé à votre libraire « Les filles de mai Ed Du Bord de l’eau ( 15 Ou 18 euros)

« Je suis du camp des prolétaires
mais après tout j’l’ai pas voulu
tout ça c’est d’la faute à Dieu le Père
fallait pas qu’il m’fasse naître toute nue ! »

Et Gaspard me direz-vous ? Il va bien ! Il continue son chemin. Il est entré au Pavillon des Amourettes ( 3ème livre)
« l’air du matin, l’entrain de la besogne, la vision de la justice, cela enlève. La fureur d’une chanson le jetait de l’avant. Et il commençait de chanter : une de ces vieilles qui s’en vont loin sur le pays, de longue résonance comme les cloches de Pâques, mais aussi dansantes et déchaînées que la bombarde. Des airs venus d’un monde plus large que celui de la tristesse et de la joie. Des airs de plain-chant /…/ Il chantait. Une amitié et une audace lui chauffait le sang, tandis qu’il faisait voler la faux dans l’épaisseur du foin, ou qu’il abattait, à grands coups tranquilles, la cognée dans le pied tremblant d’un fayard. Et il lui semblait alors qu’il viendrait à bout d’assommer le diable. »
Assommer le diable ! Une amitié et une audace.
Tous ensemble ! Tous ensemble !

03 avril 2006

30 MARS BEAUVAIS


Ç’en dessus-dessous et ç’en devant-derrière : ainsi est le temps qui flotte et file gris uniforme. Heureusement que Gaspard m’aide à le « couvrir ». « Couvrir le temps » était, pour ma mère, être de mauvaise humeur, avoir « la barre sur le front » En fait je ne suis pas trop mécontente de ce repos forcé en chambre. Marion et Eliane sont venues hier me rendre une visite de voisinage, depuis Parvilliers en Quesnoy. Prononcer, écrire les mots du terroir c’est un peu s’approprier le pays comme par les jambes. Lire, écrire : les deux visages de Janus. Quand je suis lasse de regarder l’un je me tourne vers l’autre.
« Boiteux, pied-bot, les tailleurs le plus souvent n’avaient pris cet état que parce qu’ils ne se trouvaient pas propres à travailler la terre. Celui-là avait une épaule plus haute que l’autre : roux comme le chien de st Roch, au demeurant, et l’œil dans une face de renard, grippée, futée, chafouine. Mais il se redressait pour dire d’une voix aigre à faire pisser un chat par la patte : » Deux aunes de drap et d’un paysan j’en fais un monsieur. »
Je mêle la prose de Henri Pourrat, qui n’est jamais vraiment de la prose mais toujours une gavotte de mots, à celle des journaux. Le Courrier picard que je trouve au petit déjeuner dans la salle à manger, le Canard et Libé que Pierre me sert avant de partir aux archives. Quand j’ai la tête qui déborde de lignes noires je me chante une comptine
« Mais quand vint l’heure du diner
-hôtesse, qu’allons-nous manger ?
-Vous aurez du civet de lièvre
ç’en dessus-dessous et c’en devant derrière
Et de la bonne soupe aux choux
Ç’en devant-derrière et ç’en dessus-dessous »
Mais elle me ramène encore à l’actualité elle aussi toute retournée. Libé, qui anticipe quelque peu, affirme ce matin « Naufrage de l’état-Chirac » Je crois entendre la voix aigre du tailleur chafouin s’adresser à moi à la télévision.
- Individualisme ! Irresponsabilité. Immobilisme. Immoralité. Insolvabilité.
- Hé ! Laisse-moi me justifier ! J’ai beau être à la retraite, je pense aux petits et je ne les envie pas d’entrer dans ce monde d’argent-roi, de vol à l’étalage, d’étalage de superféteries langagières et autres. Dans la manif j’entends leurs voix qui réclament respect et audace, la place qui leur revient. Ce n’est pas seulement la nostalgie de mai que je cultive c’est cet élan de vie qui nous porta si fort et redistribua un peu les cartes. C’est lui qui m’a soutenu jusqu’à aujourd’hui à travers les désespérances.
Je sais : mes yeux ne voient plus très clair. J’ai deux paires de lunettes mais quand je perds l’une et l’autre je vois quand même un peu, assez pour me conduire. Mes « lunettes pour lire » et mes « lunettes pour sortir» comme la bonne Madame Demaize du livre de Pourrat. Avant de la mettre en bière on se demanda lesquelles choisir.
Le choix n’a guère d’importance. Ç’en dessus-dessous et ç’en devant-derrière, il y a toujours pour se guider le bon sens, celui qui m’assure d’avoir choisi, une fois pour toutes, le bon camp.

02 avril 2006

PREMIER AVRIL

Quand le PREMIER AVRIL est en avance d’un jour …
il y a de bonnes blagues auxquelles on n’avait encore jamais pensé. Et qui ne font même pas rire !

- Papa, je ne veux pas me marier avec ce monsieur.
- Mais c’est pour ton bien ma petite fille, notre bien à tous. C’est moi qui décide. Tais-toi !
- Papa je ne veux pas me marier pour son bien avec ce vieux monsieur riche
- Ecoute ton père. C’est décidé. Va au lycée et passe notre bac à tous ma fille d’abord.
- Mais je l’ai dit dès le départ Maman : je ne veux pas me marier à tempérament. Je ne veux pas me marier du tout.
- Veux-tu un autre portable, un autre scooter, une autre télé, des vacances au Brésil ?
- Je veux mon ami Pierre, celui qui est en prison.
- Tu n’auras pas ton Pierre, nous le pendouillerons.
- Si vous pendouillez … Et puis zut ! Je vais à la manif. Je ne me marierai pas.
- Sois raisonnable ma fille. Nous t’avons comprise. Tu te marieras dès demain, les bans sont PROMULGUES, nous avons signé mais nous allons rédiger un contrat de mariage qui te permettra l’adultère avec qui tu voudras, après un an ou deux, ou quelques mois d’essai, ou tout de suite, avec ou sans motivation. Tu es contente ?

BEAUVAIS, 29 MARS


Quelques-un des 6OOO présents à la manif de Beauvais

Seul Gaspard arrive à me distraire de la gastro-entérite. La chambre est juste en chauffage mais suffisamment aménageable pour « tenir la chambre » et le blog. Le Nord ne retiendra de mon passage qu’un regard grisounet et pressé de retrouver la ligne bleue des Alpes. C’est vrai : ce qui me manque c’est le bleu de Chez Nous ! Il n’y a pas de bleu d’ambiance ici. Quelques jonquilles, jacinthes dans les jardinets, mais rien qui fasse exploser le bleu d’ange. Il y a eu de belles tapisseries au musée de la Tapisserie surtout celles de notre siècle qui semblent accrocher les couleurs avec un filet à papillon. J’ai retenu l’impression fugitive d’une sans thème affiché. Celle-ci j’ai envie de retourner la voir, peut-être pourrai-je la saisir sans flash. Des autos qui filent dans l’eau de la rue et s’éclaboussent finalement en feuillets de livre. Double image intéressante. Curieux comme une tapisserie peut traduire la fluidité autant qu’une aquarelle !



La rue mouillée, à plusieurs reprises hier. Quand je néglige la cathédrale pour rejoindre la manif, je ne me fais pas trop de soucis pour les Crs qui battent la semelle : au moins cinq cars. Une manif qui me réjouit le cœur. Et aussi celui de ma voisine abritée sous un porche à qui je confesse ma jubilation. Et ben ils sont tous là les gens du Nord ! Jeunes anciens travailleurs travailleuses étudiants sympathiques : des copains … Un accordéon sur l’air de la Complainte de la Butte enjoint à Villepin de renoncer mais je ne comprends pas les paroles. Le service d’ordre est efficace. J’entends la même réflexion qu’en 68 « Nous n’avons pas besoin d’ « eux » (les flics) ! » La pluie doit contribuer aussi à dissoudre les ardeurs !
68 est sur scène le soir au Théâtre du Beauvaisis « Que reste-t-il de leurs amours ?» Par Les Palétuviers. La salle est comble, il a fallu que je négocie pour avoir des places. Et bien m’en a pris. Malgré le dérangement intestinal et les nausées j’apprécie l’entrain commémoratif de ces jeunes chanteurs qui n’étaient sans doute pas nés alors. On est là, comme dans la manif, entre sympathisants, entre « peuple de gauche ». Même sans illusions sur cette fraternité elle fait du bien par où elle passe.
Hier au soir j’avais la chance de passer dans sa rue et sur son théâtre.

PS COURRIER PICARD « C’est dans une ville atone -faible circulation, absentéisme massif des élèves, chalands clairsemés, que s’est déroulée pacifiquement l’une des plus grandes manifestations depuis la dernière réforme des retraites /…/ Tous les syndicats réunis dans un rare œcuménisme ont assuré un service d’ordre sans failles /…/ Le défilé a duré deux heures et s’est dispersé vers 17 h »

01 avril 2006

GASPARD VERS LE NORD


Je suis partie vers le Nord avec Gaspard. Je comptais sur les heures de train pour faire route commune et je n’ai pas été déçue. Envoûtée. J’en oubliais de regarder le paysage et les gares traversées : Persan-Beaumont, Meru ... Tout juste un lever de tête furtif mais le Nord à peine reconnu m’intéressait bien moins que Gaspard. La platitude du Nord, ses alignées de maisons basses aux toits rouges, ses longs champs déjà verdissants …
A Beauvais - car c’est là le but du voyage- la cathédrale tente de retenir notre habitude des sommets. Elle est en travaux comme nous pouvons le constater à notre première visite en soirée. J’y reviendrai bien sûr : Le musée ce mardi est fermé.
J’ai terminé le premier livre LE CHATEAU DES SEPT PORTES et attaqué déjà largement ce matin L’AUBERGE DE LA BELLE BERGERE. Je souligne légèrement pour ne pas abîmer la belle édition. Les mots me sautent aux yeux quand ils me reviennent de mon propre passé, ou bien quand ils me sont inconnus. Je médite d’ouvrir un carnet qui les collectionne, d’aller découvrir dans le dictionnaire du Felibre de Mistral leur sens précis. Est-il raisonnable d’ainsi accorder aux mots vieillis, finis, plus qu’une visite de courtoisie ?
Mais plus que les mots isolés, leurs accordailles en phrases claires, sonnantes, ombreuses ou printanières, leur rythme, leur vision me ravissent. Plus que cette abondance de photographies à la mitraillette que la télé, Internet, nous dispensent ce que les mots de Henri Pourrat donnent à imaginer, à voir, ouvre largement les volets de la tête. Il vous faut aller sur le blog de Bruno Lorrain pour vous laisser guider. Il vous faut surtout acheter sans tarder en livre de poche le magnifique « GASPARD DES MONTAGNES » Avez-vous retenu « La vieille Marie contait … » de ce dimanche que nous avons mis en voix et en images avant de partir ? La vieille Gelzy n’attend qu’un signe de vous pour continuer la lecture. En attendant elle retourne à la sixième pause de la deuxième veillée. Le sort d’Anne-Marie, la malheureuse, la préoccupe plus que les piliers de la cathédrale. C’est pourtant cette grande déambulation annoncée contre le CPE qui est davantage d’actualité mais je ne sais pourquoi quelque chose me murmure que si les chemins ont changé, les peurs, les diableries qu’on y rencontre sont toujours les mêmes …
« Mais on commençait de voir sur les routes des vivandiers, de soldats, dont les têtes ne revenaient guère. Au jour de l’an les Cosaques avaient passé le Rhin et ils avançaient de tous les côtés. D’abord ç’avait été quelque dragon déguenillé, quelque canonnier à la joue mangée de barbe, avec l’air faux de ces bohémiens dont les poules ont peur. Maintenant chaque jour on rencontrait des déserteurs de l’armée de Lyon. Tout allait cul par-dessus tête. Le lundi de Pâques, une avant-garde de lanciers autrichiens devait même occuper St Anthème. Il y avait là cinq cents cavaliers français qui pillaient quelque peu, disaient les paysans, et se faisaient servir comme de gros bourgeois. Verrait-on la guerre dans le pays ? »